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Interview

François Asselin : « La CPME propose d'amortir le choc du malus lié à l'âge d'équilibre »

Le président de la CPME propose de mettre en place un « compte d'épargne bonus » pour que l'assuré prenant sa retraite avant l'âge d'équilibre puisse diminuer ou annuler son malus. Il est ouvert à la reconnaissance de métiers pénibles et au cumul des carrières longues et de la pénibilité.

François Asselin, président de la CPME
François Asselin, président de la CPME (Eric TSCHAEN/REA)

Par Solveig Godeluck

Publié le 29 janv. 2020 à 11:29

La conférence des financeurs qui doit faire des propositions au gouvernement pour ramener les régimes de retraite à l'équilibre financier en 2027 s'ouvre ce jeudi. Les organisations patronales ont décidé d'y participer activement.

Qu'attendez-vous de la conférence des financeurs sur la réforme des retraites ?

Depuis le début de la réflexion sur cette réforme, nous avons dit que nous voulions être acteurs, et non spectateurs. Nous avons par exemple proposé de garder trois régimes complémentaires autonomes distincts pour les fonctionnaires, les salariés du privé et les indépendants. Nous n'avons pas obtenu gain de cause. Malgré cela, nous voulons aller de l'avant et faire des propositions pour la conférence des financeurs , qui est une très bonne idée. Une réforme ne peut être crédible que si elle est équilibrée. On aurait d'ailleurs pu commencer par ça en 2017.

Vous parlez d'équilibre. Quels efforts les employeurs sont-ils prêts à faire pour redresser les comptes ?

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Je suis totalement opposé à l'augmentation des cotisations. D'abord parce que 60 % d'entre elles sont payées par l'employeur, ce qui pèse sur la compétitivité. Ensuite parce que cela nuit au pouvoir d'achat des salariés. Enfin parce qu'on ponctionnerait les générations montantes pour que ma génération puisse partir plus tôt à la retraite. Or je ne veux pas nourrir un conflit intergénérationnel.

Toutefois, nous avons une proposition à faire, autour de la création d'un âge pivot. Nous pensons qu'il va falloir collectivement travailler plus longtemps pour éviter d'augmenter les cotisations, mais qu'on pourrait amortir le choc du malus lié à cet âge d'équilibre. Nous proposons que les actifs puissent s'ouvrir un « compte d'épargne bonus » au sein de la future Caisse nationale de retraite universelle. Ils pourraient y stocker leurs RTT, heures supplémentaires ou congés payés non-consommés, un peu à l'instar de ce qui existe aujourd'hui dans la branche de la construction, qui recourt à un Perco.

Au moment de liquider ses droits à retraite, l'actif pourrait convertir en points ses droits, et partir plus tôt. On redonnerait de la liberté et de la souplesse. A chacun ensuite de choisir ses priorités.

Cela ressemble à une préretraite…

Imaginons qu'un salarié a versé plusieurs semaines de congés payés sur son compte épargne bonus. Quand il reçoit son relevé de points pour la retraite, il peut diminuer son malus en convertissant en points les droits à congés payés qui ont été accumulés. Ce n'est pas de la préretraite, car c'est un compte individuel, orienté uniquement vers la retraite. Il faudrait bien sûr que le départ anticipé soit plafonné à quelques années.

Avec ce dispositif, l'employeur n'a pas à verser de cotisations supplémentaires, car le salarié ne fait plus partie de l'effectif une fois ses droits liquidés. Cela ne fait pas non plus peser de charge sur le système de retraite.

Voulez-vous vraiment à court terme d'un âge pivot, connaissant l'opposition des syndicats ?

Au départ, nous voulions augmenter l'âge légal à 63 ans, car c'était la mesure la plus claire, permettant de conserver les carrières longues et la pénibilité, et de parler de bonus plutôt que de malus. Mais le président de la République n'en veut pas. Nous sommes donc ouverts aux trois alternatives : l'instauration d'un âge d'équilibre ; l'accélération de la réforme Touraine qui augmente la durée de cotisation ; ou le « cocktail de mesures » . Mais en matière de cocktail, la créativité manque.

Que proposez-vous en matière de pénibilité ?

Nous proposons une mesure d'équité en permettant de cumuler carrières longues et pénibilité. Pour l'instant, le gouvernement prévoit que les assurés ayant commencé à travailler très tôt pourront partir à 60 ans, mais avec une décote, parce que leur âge d'équilibre serait abaissé de deux ans, comme leur âge légal. Nous souhaitons que le couvreur qui a été exposé au port de charges lourdes puisse partir automatiquement à 60 ans sans décote, s'il a commencé sa carrière très jeune, par exemple en apprentissage.

Entendons-nous, il ne s'agit pas de réintroduire quatre critères individuels dans le compte de prévention de la pénibilité, mais de prendre en compte l'exposition de certains métiers à ces facteurs de risque. Cela ne doit pas se faire au niveau des branches, mais au niveau national, avec un financement par la solidarité de tous. De plus, il faudra définir la durée d'exposition ouvrant ces droits.

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Est-ce que la reconnaissance de ces expositions par métiers pourrait s'appliquer hors carrières longues ?

Eventuellement, mais nous avons besoin de projections financières pour savoir combien cela coûterait, en fonction de la durée d'exposition retenue. Ces données comme beaucoup d'autres nous manquent. Il faudrait aussi pouvoir réviser ces référentiels tous les cinq ans.

Peut-on demander aussi un effort aux retraités, après le psychodrame de la CSG augmentée puis abaissée pour les pensions de moins de 2.000 euros ?

On est dans la répartition, le principe c'est la solidarité intergénérationnelle. Alors je m'interroge : qu'est-ce qui justifie que les retraités paient 8,3 % de CSG, contre 9,2 % pour les actifs ? Au risque de fâcher, je mettrai le sujet sur la table ce jeudi. Je plaide pour la remontée progressive du niveau de la CSG des retraités assujettis au taux plein, et ce au fur et à mesure du recul de l'âge de départ en retraite. Tout le monde doit participer à l'effort pour remettre le système de retraite à l'équilibre. C'est une question de justice.

Solveig Godeluck

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