Après la mise en place du prélèvement à la source, Bercy a un nouvel objectif : permettre aux ménages de bénéficier de leurs crédits d’impôt “en temps réel”. C’est-à-dire, concomitamment à la dépense engagée. Un projet qui est bien dans les tuyaux comme l’a confirmé le ministre chargé des Comptes publics, Olivier Dussopt, dans une interview à MoneyVox. C’est qu’aujourd’hui, les ménages sont remboursés a posteriori de leurs dépenses qui ouvrent droit à un crédit d’impôt. Ce qui les oblige à faire une avance de trésorerie. Certes, depuis l’instauration du prélèvement à la source, l’Etat rembourse 60% du crédit d’impôt en janvier et le solde à l’été. Mais il ne faut pas oublier que les ménages, qui contractent pour la première fois une telle dépense, ne sont remboursés en intégralité qu’un an et demi plus tard après la déclaration de revenus.

Pour mettre fin à cela, Bercy travaille sur un mécanisme de “reste à charge” pour les contribuables. Le premier crédit d’impôt à devenir contemporain sera celui de l'emploi à domicile. En pratique, un particulier qui emploie par exemple une nounou, n’aura rien à faire. Il lui faudra régler un net à payer sur la plateforme Cesu, laquelle se sera occupée au préalable de déduire l’avantage du crédit d’impôt et d’éventuelles aides. Le coût de la nounou employée sera donc instantanément divisé par deux. Car, pour rappel, le crédit d’impôt pour l’emploi à domicile est de 50% du coût de la prestation (dans une limite annuelle de 12.000 euros qui peut être majorée pour enfant à charge ou membre du foyer âgé de plus de 65 ans jusqu'à 15.000 euros maximum).

La suite sous cette publicité
Publicité
La suite sous cette publicité
Publicité

>> À lire aussi - Crédit d'impôt pour frais de garde

Pour un ménage qui utiliserait une entreprise prestataire, la facture à payer sera également diminuée de moitié. C’est l’entreprise, en lien avec l’administration, qui se ferait alors régler la différence liée au crédit d’impôt. Les détails techniques seront affinés dans les prochains mois. Pour le secteur, une telle réforme devrait avoir un très fort impact, comme l’explique à Capital Maxime Aiach, président de la Fédération des services à la personne. “On espère au moins 200.000 emplois”, prévient-il. Parmi ces nouveaux emplois, on devrait compter des “arrivants” mais aussi des régularisations de travailleurs qui ne sont aujourd’hui pas déclarés.

Un coût pour les finances publiques

Mais, revers de la médaille, la mise sur pied d’un tel chantier est loin d’être simple… D’abord parce que cela aura un coût financier pour l’Etat puisque l’année de la mise à place du mécanisme, il faudra payer deux fois le crédit d’impôt aux ménages. En clair, celui de l’année précédente et celui de l’année en cours. Le crédit d’impôt du service à la personne représente, une charge d’environ 5 milliards d’euros par an pour les finances publiques. Et le budget de l’Etat est dans une période particulièrement délicate depuis la survenue de la crise sanitaire. Ensuite, le défi est technique. Il faut notamment “raccorder” des systèmes informatiques qui ne sont pas branchés entre eux. Objectif : que l’Etat dispose de toutes les informations, et notamment des éventuelles aides perçues par les foyers (APA, PCH…, etc) pour calculer convenablement le reste à charge. Dans l’objectif ensuite d’ouvrir le dispositif à d’autres crédits d’impôt : dons aux oeuvres, syndicats, etc...

La suite sous cette publicité
Publicité

Pour être sûr de ne pas se rater, le ministère de l’Economie et des Finances va lancer prochainement - cela devait intervenir en septembre, mais finalement le calendrier n’est plus arrêté - une expérimentation. Bercy va utiliser un petit panel de 300 familles localisées dans les départements du Nord et de Paris qui ont le droit au crédit d’impôt. Et qui perçoivent également l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ou la prestation de compensation du handicap (PCH). D’autres profils d’allocataires devraient venir s’ajouter par la suite à l’expérimentation. Autrement dit, la réforme n’est pas pour tout de suite…

>> À lire aussi - Ce super crédit d’impôt dont vous allez profiter pour vos abonnements à la presse

À ce sujet, la Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem) rappelle à Capital que le candidat Macron avait signé une charte pendant la campagne présidentielle l’engageant à rendre opérationnelle cette réforme au 1er janvier 2022. Mais au regard du retard accumulé et des circonstances exceptionnelles de l’année 2020, personne désormais ne croit plus à un tel calendrier. En septembre 2019, au moment de la présentation du projet à la presse, l’ex-ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, évoquait déjà lui-même un horizon lointain : 2023 ou 2024.

La suite sous cette publicité
Publicité
La suite sous cette publicité
Publicité

De quoi désoler le président de la Fédération des services aux particuliers, Maxime Aiach : “Dans deux ou trois ans, ce sera presque une autre vie, alors que l’on aurait besoin d’un tel dispositif maintenant !“, soupire-t-il. Et de constater : “Les équipes qui pilotent le dossier à l’Acoss (Agence centrale des organismes de sécurité sociale) sont compétentes mais les ressources de l'organisme pourraient être étoffées. Ne faudrait-il pas embaucher quelques consultants ou ingénieurs informatiques supplémentaires pour répondre à l’enjeu ?” La relance de l’économie française passe aussi, peut-être, par des innovations techniques en matière de fiscalité.

>> Notre service - Économisez jusqu’à 300 euros par an en testant notre comparateur de tarifs bancaires